Et si, la
lecture du prologue de « J’ai tué mon auteur » vous donnait le goût
de vous le procurer dans la boutique en ligne des éditions Noir Québec (https://bit.ly/3Hah8O4) ou de l’emprunter à
votre bibliothèque municipale !
Je l’avoue.
J’ai assassiné CELUI qui m’a créé, qui m’a imaginé, qui
m’a donné vie.
Et j’ai prémédité ce meurtre avec rancœur.
D’entrée de jeu, je vous fais grâce d’une constante
dans tout bon polar: celle de l’épilogue qui vous ferait découvrir le
responsable improbable de cette vengeance après une enquête truffée de
rebondissements tout aussi déroutants les uns que les autres. De surcroît, je
vous épargne de longues descriptions des lieux et des décors où se déroule
l’action. Sans détour, je plaide publiquement coupable d’un homicide mûrement
planifié.
Je ne cours aucun risque en avouant mon crime.
Aucun policier ou détective d’une instance municipale,
nationale, voire internationale, ne peut me mettre la main au collet.
Aucun procureur général de la poursuite ne peut porter
quelque accusation que ce soit contre moi.
Aucun avocat, même le plus véreux, ne peut me
défendre.
Aucun jury ne peut me déclarer coupable.
Aucun juge ne peut m’infliger une peine.
Je suis un personnage fictif sans existence réelle. En
toute impunité, je peux passer aux aveux sans aucun risque.
J’ai donc pris la décision de publier moi-même mon
récit.
D’en assurer sa diffusion; sa vente dans des boutiques
en ligne; sa disponibilité dans des magasins à très grandes surfaces, exposé
derrière un barrage de babioles en tout genre, ou mieux, dans des librairies
indépendantes;
D’en voir son accessibilité dans un maximum de bibliothèques;
son éventuel accueil par la critique dans les médias traditionnels et sur les
réseaux sociaux, même si je ne me fais pas d’illusion.
Enfin de jouir de son acquisition par un grand nombre
de lect…
Le rêve et la finalité de tout écrivain.
Et qui sait, porté à l’écran par un réalisateur
empathique grâce aux investissements publics ou à l’enthousiasme des Netflix de
ce monde.
Après tout, ce n’est pas tous les jours que le
personnage principal d’un roman se transforme en auteur pour raconter sa propre
histoire pathétique.
Vous qui tenez entre vos mains cette plaquette en
fibres végétales ou dématérialisée que vous avez achetée ou empruntée, je vous remercie
pour l’audace de votre choix.
Tel Ulysse appâté par le chant fatal des sirènes mythologiques,
vous n’avez pas succombé au charme enjôleur des vedettes hypermédiatisées en ne
vous précipitant pas vers elles malgré une forte tentation.
Je suis d’autant plus motivé de partager avec vous ce
que vous ignorez du monde «idyllique» de l’édition.
Permettez-moi d’abord de soulever une question existentielle
à laquelle nous, personnages de romans, nous heurtons toutes et tous.
Imaginez un instant que vous soyez le protagoniste
d’un auteur inconnu du grand public, le héros d’une première fiction à vie,
tous genres littéraires confondus. Savez-vous que, sans même avoir exprimé
votre volonté, votre avenir en tant que personnage est hypothéqué à long terme,
voire à tout jamais, avant même votre première apparition dans le récit ou la
citation de vos premières paroles précédées d’un tiret allongé? N’est-ce pas là
une prémisse d’en vouloir à mort à celui qui s’est octroyé le droit de disposer
de votre avenir? À celui qui a choisi pour vous votre destinée irrévocable, particulièrement
si elle n’est pas à la hauteur de vos ambitions?
Mettez-vous à ma place: convenez que, comme moi, vous désireriez
vous libérer du fardeau imposé par celui qui vous aurait entraîné dans une
aventure catastrophique !
Vous croyez que j’exagère?
Laissez-moi témoigner, pour ma défense, et vous exposer en long et en
large, les motifs pour lesquels j’ai d’abord souhaité, puis planifié et enfin
mis en scène l’assassinat de mon AUTEUR. Avec ce qu’IL m’a fait subir, vous
auriez probablement suivi mon parcours, au risque, dans votre cas puisque vous
existez réellement, d’être condamné pour un crime presque parfait. Comme vous
le verrez, je suis pleinement en mesure de justifier les gestes qui ont permis
d’assouvir ma colère
refoulée et d’étancher ma soif de vengeance. En L’éliminant de l’écosystème
éditorial de façon aussi catégorique, je peux devenir moi-même un personnage-auteur
célèbre, un héros mythique, statut que sans nul doute devrait me consacrer le
sérail fermé de mes pairs.
Installez-vous bien confortablement et laissez-moi
vous raconter le drame déchirant de ma vie virtuelle.